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Portraits de nos Poilus de 14/18 et Hambye 1940/1944

Portrait des combattants de 14/18 de mon village 50450 Hambye. Evénements à la libération et pendant l'occupation allemande à Hambye, Saint-Denis-le-Gast, Gavray.

FREJUS 2 décembre 1959

Le bas de Fréjus et les Arènes le lendemain de la rupture du barrage

Le bas de Fréjus et les Arènes le lendemain de la rupture du barrage

Le 2 décembre 1959 le barrage de Malpasset cédait sous la pression des pluies abondantes, la hauteur des eaux avait atteint le niveau de rupture, le gardien attendait l’ordre d’ouvrir les vannes pour alléger la pression…
J’étais soldat depuis un mois au camp Gallieni.
Ce soir-là je me rendis au foyer pour une séance de cinéma. A mon retour, au moment de rejoindre mon baraquement, plus de lumière. Nous sommes restés dehors, nous entendions un grondement, un mini tremblement de terre...Nous apprîmes la rupture du barrage, les eaux furieuses avaient atteint la ville de Fréjus. Au loin nous entendions des cris, des appels au secours, c’était effrayant ! Une compagnie rentrait d’une manœuvre de nuit dans la vallée du Reyran, il en a fallu de peu qu’elle soit emportée par les eaux boueuses déferlant vers la mer.Les hommes étant équipés, ils partirent immédiatement sur Fréjus. Je fus surpris d'apprendre qu'il n'y avait plus de gens à sauver mais que leur mission, la nuit avait été de surveiller les abords de la ville empêchant tout pillage et que dès les premières lueurs du jour ils ramassaient les cadavres.
A la première heure le lendemain matin nous sommes descendus à pied, apporter notre aide. Notre section fut affectée à un pâté de maisons complètement désertées. Il nous fallait évacuer la boue des sous-sols, protéger ce qui pouvait être sauvé comme biens matériels... C'est ainsi aux abords sous un arbre couché nous avons découvert dans les branches enfoui dans la boue le corps d'un bébé... l'évoquer me fait toujours le même effroi. 
Fréjus était une place militaire importante, il y avait des soldats partout, de nombreuses victimes ont été repérées par eux, amenées à l'hôpital au haut de la ville, nettoyées au jet d'eau des pompiers, la ronde d'hélicoptères était incessante. Des religieuses dévouées préparaient les corps pour l'identification, aidées de bénévoles et des militaires.
Quant à ma première journée dans cette rue dont les murs étaient marqués par le niveau d'eau atteint la veille au soir, nous avons surtout fait du nettoyage. Pour l'anecdote, nous avions un café et toutes les bouteilles se trouvant dans la cave inondée ont été rangées au sec, mais pas toutes, nos poches de treillis étaient pleines... Rentrer au camp à pied avec nos bouteilles de bières, de soda... s'entrechoquant entre elles, avait un coté spectaculaire et sinistre... Il nous avait été précisé, du fait de l'immersion, ces bouteilles étaient impropres à la consommation.
Notre compagnie la journée suivante a été affectée au cimetière. Il nous fallait aplanir le fond de la fosse commune au fur et à mesure qu'elle était creusée. Puis décharger les camions de cercueils, les porter, les descendre au fond, attendre le passage de la famille et reboucher à la pelle... Dans ce cadre j'ai assisté à une scène très dure, un sergent-chef et sa femme accompagnaient leur cinq ou six autres enfants décédés dans la catastrophe, ils avaient emporté avec eux leurs jouets et les jetaient sur leurs cercueils rangés au fond. Très pénible, beaucoup d'entre nous pleuraient. Je cite de mémoire, il s'agit du sergent ROBERT, sa femme aurait tenu son dernier dans ses bras au dessus de sa tête le sauvant de la mort.
La troupe mise à disposition des autorités civiles a apporté un coup de main pendant tout le mois de décembre. Nous avons participé à la remise du réseau eau, gaz... à creuser des tranchées là où la situation réclamait des bras, nous étions là.
Plus tard quand nous promenant en ville, passer dans un bistrot ou au restaurant, souvent il nous était offert à boire, une tournée. Les gens de Fréjus se sont montrés reconnaissants envers la troupe si présente et si active lors de ces journées dramatiques.
Le général de Gaulle est venu à Fréjus, les soldats qui lui présentèrent les armes étaient de ma compagnie. Le Président, informé du peu de temps d'instructions reçues leur adressa un vigoureux FÉLICITATIONS ! 
Il signa le livre d’Or de la ville de Fréjus, a ses cotés André Léotard, maire de la ville.
«  Que Fréjus Renaisse ! » 

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